Rechercher
Close this search box.
Rechercher
Close this search box.

Le magazine de référence du marché de l’art

Les arbres, signification

Depuis la nuit des temps, les arbres et les plantes occupent une place centrale dans l’imaginaire humain. Symboles de vie, de renouveau, de sagesse ou encore de puissance, ces végétaux ont nourri les mythes et les croyances des civilisations antiques jusqu’à inspirer la symbolique chrétienne. Au fil des siècles, chaque espèce végétale s’est vue attribuer des significations particulières, tissées de légendes et de traditions qui ont traversé les âges.

Dans cet article, nous explorerons la richesse de cette symbolique à travers une sélection d’arbres emblématiques :  le palmier, la vigne, le laurier, l’olivier, le lierre, le myrte, le saule, le peuplier, le chêne, le genévrier et le cyprès. Chacune de ces espèces dévoile une facette unique de la relation entre l’homme et la nature, reflétant à la fois les aspirations, les croyances et les valeurs des sociétés qui les ont vénérées.

Ensemble, plongeons dans ce voyage botanique à travers les âges, à la découverte des histoires fascinantes et des symboles puissants qui ont façonné notre rapport au monde végétal. Que ce soit dans les mythes de la Grèce antique, les récits bibliques ou les traditions païennes, les arbres et les plantes continuent de nous raconter des histoires anciennes, chargées de sens et de mystère. Notre guide dans ce voyage, est la Bible en la matière pour les passionnés d’art, le grand guide d’iconologie de Cesare Ripa ainsi que l’ouvrage de Lucia Impelluso Comment regarder la nature et ses symboles ? Si vous souhaitez aller plus loin, n’hésitez pas à les consulter.

LE PALMIER

Symbole de gloire, de victoire

Depuis l’Antiquité, le palmier a été vénéré pour sa silhouette harmonieuse et ses branches semblables à des rayons, rappelant le Soleil et évoquant la gloire et l’immortalité. Sa majesté naturelle a fait de lui un symbole puissant, associé à la victoire et aux heureux présages.

Dans les temps anciens, une branche de palmier était offerte au vainqueur comme emblème de son triomphe. Cette tradition est également présente dans la légende des origines de Rome. Horace raconte que Rhéa Silvia, avant de donner naissance à Romulus et Rémus, rêve de voir ses fils représentés par des branches de palmier majestueuses s’élevant vers le ciel.

Le christianisme a repris ce symbolisme en adoptant la palme comme signe de la victoire sur la mort. C’est pourquoi dans l’iconographie chrétienne, les saints martyrisés sont souvent représentés avec une branche de palmier, symbole de leur triomphe spirituel.

Le palmier est aussi lié à la Vierge Marie, comme l’évoque le Cantique des Cantiques : “Dans ton élan, tu ressembles au palmier, tes seins en sont les grappes”.

 Dans certaines représentations de l’Annonciation, l’archange Gabriel tient une palme lorsqu’il annonce à Marie l’approche de sa mort. De plus, dans les scènes de la Dormition ou de la mise au tombeau de la Vierge, saint Jean porte souvent une branche de palmier, selon La Légende Dorée.

Saint Christophe est parfois représenté avec un palmier, car après avoir traversé la rivière avec l’enfant Jésus, son bâton prend racine et se transforme en palmier, annonçant ainsi son futur martyre.

La Sainte Famille, lors de sa fuite en Égypte, trouve refuge à l’ombre d’un palmier qui, selon les Évangiles, plie ses branches pour offrir ses fruits. En gratitude, l’enfant Jésus tend une palme aux anges pour qu’ils l’emportent au paradis, symbolisant la protection divine.

Lors de l’entrée de Jésus à Jérusalem, la foule coupe des rameaux de palmier pour l’accueillir, témoignant de leur respect et de leur adoration. Cette scène est commémorée chaque année lors du Dimanche des Rameaux.

Sainte Ursule est souvent représentée sur une gerbe de palmes, symbolisant sa victoire spirituelle, comme dans L’apothéose de sainte Ursule.

Enfin, le palmier symbolise également la concorde, comme dans le Portrait allégorique de Charles Quint dans lequel un ange apporte à Charles Quint une branche de palmier pour la victoire et un rameau d’olivier pour la paix.

Ainsi, le palmier, au-delà de sa beauté naturelle, incarne des valeurs profondes de victoire, de spiritualité et de paix, reliant des traditions anciennes aux croyances chrétiennes et continuant à inspirer notre imaginaire collectif.

La vigne

Symbole de vie, de sacrifice et de foi

La vigne, plante vénérée depuis l’Antiquité, est étroitement liée à Bacchus, le dieu du vin, et à ses ménades. Lors des cortèges dédiés à ce dieu, les participants couronnaient leur tête de feuilles de lierre, célébrant ainsi l‘abondance et la joie de vivre. La vigne, en tant que motif ornemental, traverse les époques et les styles, apparaissant dans les peintures des catacombes, les mosaïques byzantines et les sculptures des cathédrales médiévales.

Dans les Écritures, la vigne et son fruit sont souvent mentionnés et sont généralement perçus comme des symboles de Jésus et de son sacrifice, ainsi que de la foi chrétienne. Cette symbolique s’appuie sur le célèbre passage de l’Évangile de Jean où le Christ déclare : « Je suis le vrai cep ». Le raisin et le vin évoquent particulièrement la Passion et la Cène. C’est pour cela que le pain, le vin et le raisin apparaissent fréquemment dans les natures mortes, les représentations de la Vierge avec l’Enfant, les scènes de la Cène et les pèlerins d’Emmaüs.

L’Ancien Testament rapporte l’épisode de l’ivresse de Noé, souvent représenté par les artistes. Noé, ayant planté une vigne, s’enivre de son vin et se dénude dans sa tente. Sem et Japhet, ses fils, le couvrent de son manteau sans regarder sa nudité, tandis que Cham, qui a vu son père dans cet état, informe ses frères. Cette scène est souvent représentée avec Noé sous une tonnelle de vigne, rappelant l’importance de la vigne dans les récits bibliques.

Saint Augustin, dans ses écrits, compare le Christ à une grappe de raisin de la Terre promise jetée sous un pressoir, une image fréquemment illustrée en Italie. Une énorme grappe de raisin sur un bâton fait directement référence à la croix et à l’eucharistie, soulignant la dimension sacrée du vin.

La vigne, présente derrière la Vierge dans certaines représentations, fait allusion à la future passion de Jésus-Christ. La pomme que l’Enfant Jésus tient à la main symbolise la rédemption de l’humanité par son sacrifice et sa Passion. On peut également voir de la vigne entre deux anges, comme dans La Vendange de l’Apocalypse du polyptyque de l’Apocalypse à Venise, où l’ange exhorte à vendanger les grappes de la vigne de la terre, car les raisins sont mûrs.

Ainsi, la vigne, bien plus qu’une simple plante, incarne des valeurs profondes de vie, de sacrifice et de foi, traversant les traditions et les croyances pour continuer à nourrir notre imaginaire collectif.

Le laurier

Symbole de victoire, d’éternité et de pureté

Depuis l’Antiquité, le laurier est intimement lié à Apollon, le dieu du Soleil, de la musique, des arts, de la beauté et de la poésie. Ce lien trouve son origine dans le mythe de la nymphe Daphné, qui, pour échapper à l’amour d’Apollon qu’elle ne partageait pas, fut métamorphosée en laurier. En conséquence, le laurier devint l’arbre sacré d’Apollon, célébrant la joie et la victoire.

Des branches de laurier étaient portées triomphalement pour symboliser la victoire, et des couronnes de laurier ornaient la tête des poètes, devenant ainsi un attribut de ceux qui se consacrent à la musique et à la poésie. Le laurier était également utilisé dans les rites prophétiques et purificatoires, marquant son importance dans divers aspects de la culture antique.

Dans la Rome antique, le laurier était consacré à Jupiter. Lors des triomphes militaires, le général victorieux se faisait précéder de messagers offrant des branches de laurier à la statue de Jupiter sur le Capitole, avant de pénétrer triomphalement dans la ville, portant lui-même des branches de laurier en signe de victoire.

Selon la doctrine chrétienne, le laurier symbolise à la fois l’éternité, car il reste toujours vert, et la chasteté, car son feuillage ne flétrit jamais. Il est parfois associé à la figure de la Vierge Marie, dont les paroles, dit-on, sont parfumées comme les feuilles du laurier.

La Renaissance a particulièrement diffusé l’image allégorique de la Victoire, représentée comme une figure féminine ailée plaçant une couronne de laurier sur la tête des vainqueurs. On retrouve cette symbolique dans de nombreuses œuvres d’art, comme Apollon et Daphné d’Antonio del Pollaiolo, Dante Alighieri de Luca Signorelli, et Laure de Giorgione, où la branche de laurier évoque par assonance le nom de la bien-aimée de Pétrarque, Laure.

Dans le Portrait d’un homme tenant une petite branche de laurier de Camille Boccaccino, le laurier symbolise la gloire immortelle pour les poètes et les vainqueurs, mais peut aussi représenter l’éternité et la constance. Cet homme pourrait être un amant offrant son amour éternel à sa bien-aimée, espérant en retour une fidélité réciproque.

Ainsi, le laurier, bien plus qu’un simple arbre, incarne des valeurs profondes de victoire, d’éternité et de pureté, traversant les âges et les civilisations pour continuer à enrichir notre patrimoine culturel et spirituel.

l'olivier

Symbole de paix et de réconciliation

Depuis l’Antiquité, l’olivier est reconnu comme l’emblème universel de la paix dans les civilisations et les religions du bassin méditerranéen. Un ancien mythe raconte comment Neptune et Minerve se disputaient la possession de l’Attique. Devant l’Assemblée des dieux, ils devaient offrir le don le plus précieux. Neptune fit jaillir une source d’un rocher, tandis que Minerve fit naître un olivier. Ce dernier fut considéré comme le don le plus précieux, et l’olivier devint ainsi un symbole durable de paix.

Cette symbolique de paix est renforcée par la nature même de Minerve, une déesse guerrière, mais opposée à Mars. Elle combat pour l’établissement et le maintien des lois et de l’ordre. L’olivier devient également un symbole de paix entre les dieux et les hommes lorsqu’il apparaît dans le bec de la colombe revenant vers Noé pour annoncer la fin du Déluge et le retrait des eaux.

Dans l’art chrétien, l’olivier est souvent présent dans les représentations de l’entrée de Jésus à Jérusalem. Parfois, la foule tient des rameaux d’olivier au lieu des traditionnelles branches de palmier. Cette substitution est sans doute liée au fait que cette scène se déroule près du Mont des Oliviers. Par exemple, dans l’œuvre du Maître d’Uttenheim L’entrée de Jésus à Jérusalem, on peut voir cette variation.

L’olivier est également central dans la scène de la prière au jardin des oliviers, comme illustré par Sandro Botticelli. Ici, l’ange qui apparaît pour réconforter Jésus tient un calice, symbole de la Passion imminente, tandis que les branches d’olivier désignent le Mont des Oliviers. Les apôtres Pierre, Jacques et Jean, qui accompagnent Jésus, sont souvent représentés profondément endormis.

Parfois, dans les représentations de l’Annonciation, c’est une branche d’olivier que l’ange Gabriel tient, au lieu du traditionnel lys. Cette variante est particulièrement connue chez les peintres siennois, qui préfèrent éviter de représenter la fleur de lys, emblème de Florence, une cité souvent en conflit avec Sienne. Un exemple notable est l’œuvre de Francesco Di Giorgio Martini L’Annonciation.

Ainsi, l’olivier, avec ses feuilles argentées et sa longévité, incarne des valeurs profondes de paix, de réconciliation et d’espoir, traversant les mythes antiques et les croyances chrétiennes pour continuer à symboliser la sérénité et l’harmonie dans notre imaginaire collectif.

LE MYRTE

Symbole de beauté, fécondité et fidélité

Le myrte, petit arbuste aux feuilles persistantes et aux fleurs délicates, est depuis longtemps associé à la déesse Vénus. Selon Ovide, c’est avec le feuillage de cet arbuste que Vénus, déesse de la beauté née de la mer, couvre sa nudité lorsqu’elle aborde l’île de Cythère. Cette association avec Vénus a fait du myrte un symbole de beauté et de fécondité.

Une autre légende raconte que Bacchus, dieu du vin, doit se rendre aux Enfers pour libérer sa mère Sémélé, tuée par la foudre de Jupiter. En échange, il promet de laisser un myrte dans les Enfers, donnant à cet arbuste une connotation funèbre ( bien que cette association soit rare dans l’iconographie!) .Le myrte a toujours été principalement chargé de connotations positives, étant une plante consacrée à Vénus et symbole de fécondité. Dans l’Antiquité, les jeunes époux portaient une couronne de myrte durant le banquet de leurs noces, et Pline l’Ancien appelait cet arbuste myrtus conjugalis.

Ainsi, au moment de la Renaissance, le myrte devient également un symbole de fidélité et d’amour éternel, grâce à la persistance de son feuillage vert et son lien avec le mariage. Il figure souvent dans les allégories matrimoniales ! 

 Par exemple, dans l’œuvre de Véronèse, L’union heureuse, les mains des conjoints se rejoignent sur une branche d’olivier, symbole de concorde et de paix, tandis que l’épouse est coiffée d’une couronne de myrte.

En raison de la délicatesse et de la couleur blanche de ses fleurs, le myrte est aussi associé à la Vierge Marie, symbolisant sa pureté et son humilité.

Un rameau de myrte peut être représenté dans la main du prophète Isaïe, en vertu du passage de son livre : « Au lieu d’épines croîtra le cyprès, au lieu d’orties croîtra le myrte. Ce sera pour Yahvé une renommée, un signe éternel, infrangible. » Le myrte peut également apparaître dans les mains de saint Joseph, souvent sous forme d’un petit bouquet de fleurs blanches, symbolisant son union avec Marie. On peut le constater dans le tableau de Francisco de Herrera l’Ancien, Saint Joseph avec l’Enfant Jésus.

Ainsi, le myrte, avec ses multiples symboliques, traverse les époques et les cultures pour représenter la beauté, la fécondité, la fidélité et la pureté, enrichissant notre imaginaire collectif de sa présence discrète mais significative.

LE saule

Entre stérilité et espérance

L’image du saule est souvent chargée de connotations négatives depuis l’Antiquité, probablement parce que ses fruits semblent tomber avant d’être mûrs. Déjà dans l’Odyssée, Homère mentionne cette particularité lorsque Circé indique à Ulysse comment atteindre l’Hadès :

« Quand ton vaisseau arrivera au bout de l’Océan, tu trouveras un rivage plat et les bois sacrés de Perséphone : hauts peupliers noirs et saules qui perdent leurs fruits. Échoue là ta nef, près de l’Océan aux profonds remous ; toi, entre dans l’humide demeure d’Hadès. »

Cette croyance en l’infécondité du saule était répandue dans l’Antiquité et Pline l’Ancien la mentionne également. Dans la culture chrétienne, l’image du saule prend une acceptation à la fois négative et positive. Il est symbole du péché et du deuil, mais aussi de la foi et du fidèle en général.

La signification positive résulte de l’interprétation d’un passage d’Isaïe où Dieu déclare qu’il répandra sa bénédiction sur les descendants de Jacob et les générations futures qui « croîtront comme l’herbe entourée d’eau et comme les saules au bord des cours d’eau ». Quant à l’acception négative, elle provient de l’exégèse d’un passage des Psaumes : « Au bord des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, nous souvenant de Sion ; aux saules d’alentour nous avions pendu nos harpes. »

À la Renaissance, la stérilité présumée du saule inspire la représentation allégorique de la Disette. Cesare Ripa la décrit comme une femme émaciée et mal vêtue, debout à côté d’une vache maigre, tenant dans sa main droite une branche de saule et dans sa main gauche une pierre ponce. Toutes deux sont considérées comme stériles, car « la stérilité est la raison principale de la disette. »

Ainsi, le saule, bien que souvent perçu négativement à cause de ses fruits précoces, symbolise également l’espérance et la bénédiction dans la foi chrétienne. Ce double sens enrichit notre compréhension de cet arbre, qui, malgré ses connotations de deuil et de stérilité, incarne aussi la résilience et la croissance spirituelle.

Le peuplier

Arbre de deuil et de salut

Le peuplier, riche en symboles, porte une connotation funèbre depuis l’Antiquité. Ovide raconte que les Héliades, sœurs de Phaéton, furent transformées en peupliers alors qu’elles pleuraient leur frère, mort après avoir été jeté du char du Soleil. Cette image de deuil est renforcée par Pline l’Ancien, qui rappelle que les défunts étaient recouverts de feuilles de peuplier noir

Au 17ème siècle, Vincenzo Cartari note que le peuplier est considéré comme un arbre infernal, censé croître sur les rives de l’Achéron.

Selon Cartari, lorsqu’Hercule descend aux Enfers pour capturer le chien Cerbère, il se ceint le crâne de rameaux de peuplier. Les feuilles de ces rameaux blanchissent au contact de son front baigné de sueur et noircissent en absorbant les fumées infernales. C’est pourquoi Hercule est parfois représenté avec une couronne de feuilles de peuplier dans les tableaux illustrant cette aventure.

Dans la culture chrétienne, le peuplier garde sa connotation funèbre et fait allusion à la Passion du Christ. Cependant, il peut aussi évoquer le salut, car, selon les Anciens, ses feuilles ont la propriété de guérir les morsures de serpents. Cette dualité symbolique est marquée par le contraste entre le peuplier noir, représentant la future Passion du Christ, et le peuplier blanc, image de salut.

Enfin, le peuplier peut symboliser le mariage, comme mentionné dans L’histoire Naturelle de Pline. Dans la campagne de Campanie, la vigne grimpe rapidement le long du peuplier, symbolisant une union harmonieuse.

Dans le contexte de la Crucifixion, la présence du soleil et de la lune renvoie à l’iconographie médiévale. 

Pour saint Augustin, la lune symbolise l’Ancien Testament, compréhensible seulement à la lumière du Nouveau Testament, représenté par le Soleil. Les Évangiles synoptiques rapportent que, vers midi, le soleil s’éclipsa, plongeant le pays dans l’obscurité, un signe de deuil pour la mort de Jésus-Christ.

Ainsi, le peuplier, bien que souvent associé à la tristesse et à la mort, porte également des connotations de guérison et de salut, enrichissant notre compréhension de cet arbre polyvalent.

Le chêne

Symbole de force et de résistance

Le chêne, majestueux par son tronc robuste, sa ramure étendue et son feuillage dense, est vénéré depuis toujours. Sa grande résistance en fait une image de force physique et morale. Les Celtes le vénéraient, et dans la mythologie classique, il est l’arbre consacré à Jupiter. De grands chênes croissent dans la forêt de Dodone, en Épire, un des plus anciens sanctuaires grecs consacré à l’oracle de ce dieu.

Dans la culture chrétienne, le chêne prend de nombreuses significations, généralement liées à ses caractéristiques botaniques. Il est d’abord l’image de l’arbre de la vie et symbolise aussi le salut, peut-être parce que son bois est réputé incorruptible. Certains pensent même que la croix de Jésus-Christ aurait été faite en bois de chêne. Dès le Moyen Âge, il est également associé à la Vierge Marie.

Les légendes sont si nombreuses qu’un thème iconographique se développe : La Madone au chêne. Si vous souhaitez en voir un je vous conseille La Sainte Famille sous un chêne, conservé au Musée Del Prado.

Grâce à sa robustesse et à sa dureté, le chêne devient un emblème de la foi et de la résistance du chrétien face à l’adversité. Ces caractéristiques conviennent aussi pour représenter les figures allégoriques de la Force et de la Prospérité, qui portent souvent un rameau de chêne.

Toujours dans l’iconographie chrétienne, c’est aussi saint Jérôme qui est représenté avec un chêne ! Vous pouvez aller voir Saint Jerôme dans un paysage de Lambert Van Noort conservé à Namur. En pénitent, saint Jerôme est représenté se frappant la poitrine avec une pierre en signe de repentir et pour vaincre les tentations de la chair. La présence du chêne dans ces scènes illustre la solidité et la foi infrangible du saint.

Dans La Vierge et l’Enfant Jésus avec sainte Catherine d’Alexandrie et saint Thomas de Lorenzo Lotto, un ange s’apprête à poser sur la tête de la Vierge une couronne de jasmin. En effet, cette fleur est l’un des attributs de la Madone car elle éclot généralement en mai. Le mois de mai est consacré à Marie, tandis que sa couleur blanche évoque la pureté de la Vierge. 

Le chêne ici peut être un attribut marial, mais aussi un symbole de force et de résistance face à l’adversité.

En conclusion, le chêne, par sa robustesse et sa majesté, est un symbole puissant de force et de résistance. Il représente la foi chrétienne inébranlable et la capacité à surmonter l’adversité.

LE GENÉVRIER

Symbole de chasteté et d'éternité

Le genévrier, à la fois modeste et robuste, a une place significative dans la mythologie et la symbolique chrétienne. Apollonios de Rhodes nous explique comment Médée aide Jason à s’emparer de la Toison d’Or en endormant le dragon gardien de celle-ci avec des potions tirées du genévrier.

La baie de genièvre, protégée par ses feuilles épineuses comme la châtaigne par sa bogue, est associée à la chasteté. Ce lien repose sur une observation de Pline l’Ancien, qui signale que le bois du châtaignier n’est pas attaqué par les vers.

→ Piero di Cosimo, Allégorie de la Chasteté, vers 1490, Washington Gallery of Art.

Pline l’Ancien mentionne également que le bois du genévrier a la propriété de ne pas dépérir. Il cite l’exemple d’un temple consacré à Diane à Sagonte, en Espagne, bâti avec des poutres de genévrier deux cents ans avant la guerre de Troie et encore en parfait état à son époque. C’est pourquoi le genévrier est aussi un symbole d’éternité.

Les feuilles épineuses du genévrier rappellent la passion du Christ, en particulier la couronne d’épines. Dans les représentations de la Vierge à l’Enfant, le genévrier apparaît pour évoquer le destin tragique de Jésus.

Le genévrier est donc présent dans les scènes où la chasteté est mise en avant. On le retrouve souvent dans des représentations de martyres qui ont voulu rester chastes pour être fidèles à Dieu.

L’histoire de Judith est emblématique à cet égard. Feignant de trahir son peuple et de vouloir aider l’armée ennemie, Judith réussit à s’approcher du général Holopherne. Celui-ci s’éprend d’elle et organise en son honneur un grand banquet. Judith, restée seule avec son hôte, en profite pour lui trancher la tête d’un coup d’épée. Le genévrier symbolise ici la chasteté que Judith a su conserver. À côté de Judith est souvent représentée une tête coupée, celle d’Holopherne, le général assyrien dont l’armée assiégeait la ville israélite de Béthulie. Judith tient à la main un rameau d’olivier pour symboliser la paix qu’elle apporte aux Hébreux avec la mort d’Holopherne. Si vous souhaitez voir un exemple de cet épisode, vous pouvez aller voir celui de Sandro Botticelli, Judith revient à Béthulie avec la tête tranchée d’Holopherne.

En conclusion, le genévrier, par ses caractéristiques et ses légendes, est un puissant symbole de chasteté et d’éternité. Ses feuilles épineuses rappellent la couronne d’épines du Christ, et il est souvent présent dans les scènes mettant en avant la pureté et la fidélité.

LE cyprès

Symbole de deuil et d'ascension spirituelle

Le cyprès, majestueux et élancé, a toujours été associé à des significations funèbres et spirituelles. Les poètes grecs et latins lui attribuent cette connotation funèbre et le considèrent comme l’arbre des défunts. Pline l’Ancien rappelle que le cyprès est consacré à Pluton, le dieu des enfers.

Ovide rapporte la légende du jeune Cyparissus qui passe une grande partie de son temps dans les bois en compagnie d’un cerf aux cornes dorées, consacré aux nymphes. Un jour, dans la chaleur d’un après-midi d’été, le cerf s’étend à l’ombre des arbres et, sans le vouloir, Cyparissus le transperce de son javelot. Désespéré, le jeune homme demande aux dieux que son deuil soit éternel et il est métamorphosé en cyprès, l’arbre de la douleur. Dès lors, le cyprès est planté près des tombes et pousse près de ceux qui souffrent, en symbole du deuil inconsolable.

La tradition chrétienne reprend cette symbolique là en l’appliquant à ses propres épisodes, notamment relatifs aux martyrs. Vous pouvez admirer celui de sainte Lucie de Domenico Veneziano à Berlin. La présence du cyprès annonce la mort prochaine de la sainte.

Aussi, le cyprès est également associé à la Vierge Marie, à Jésus Christ et à l’Église. Cela en raison de sa forme élancée qui pousse haut vers le ciel, symbolisant l’ascension spirituelle. C’est pourquoi on trouve des cyprès dans les scènes de l’Annonciation. Vous pouvez par exemple aller voir cette scène peinte par Alesso Baldovinetti.

Certains pensent que le cyprès est, avec le cèdre, l’olivier et le palmier, l’un des quatre arbres dont le bois a été utilisé pour la croix de Jésus-Christ.

Enfin, le cyprès est l’un des attributs allégoriques de la figure du désespoir : elle tient une branche dans la main droite car, de même que le cyprès ne repousse pas s’il est coupé, de même l’homme en proie au désespoir finit par annihiler en lui toute possibilité de cultiver le courage et la vertu.

Le cyprès, par son lien étroit avec le deuil et la mort, trouve naturellement sa place dans l’iconographie chrétienne et mythologique. Son apparence élancée et sa résilience le rendent également symbole d’élévation spirituelle et de connexion divine.

Conclusion

À travers les âges, les arbres ont toujours été des symboles puissants et évocateurs, chacun portant ses propres légendes et significations. Les cultures anciennes et les religions ont puisé dans la majesté et les particularités botaniques de ces arbres pour en faire des symboles de concepts universels tels que la force, la chasteté, la fidélité, et la douleur.

Le chêne, avec sa majesté et sa robustesse, est devenu l’image de la force physique et morale, vénéré par les Celtes et les Grecs, et associé à la Vierge Marie dans la tradition chrétienne. Son bois, réputé incorruptible, évoque la durabilité et la foi inébranlable.

Le genévrier, utilisé par Médée pour endormir le dragon, est un symbole de chasteté et d’éternité. Sa présence dans les représentations de la Vierge à l’Enfant rappelle la pureté et la prévoyance de la destinée tragique du Christ.

Le cyprès, arbre funèbre par excellence, symbolise le deuil inconsolable et la douleur, mais aussi l’ascension spirituelle grâce à sa forme élancée. Sa relation avec Pluton et son utilisation dans les scènes de l’Annonciation montrent sa dualité en tant que symbole de mort et d’élévation.

Ces arbres, riches en histoire et en symbolique, transcendent les simples représentations botaniques pour devenir des emblèmes profonds de la condition humaine. Ils nous rappellent la résilience face à l’adversité, l’importance de la pureté et de la fidélité, et l’inévitable réalité de la mort. Ainsi, à travers ces symboles arboricoles, les artistes et les écrivains de toutes les époques ont su capter et exprimer les nuances complexes de l’expérience humaine, offrant des leçons intemporelles de courage, de vertu, et de foi.

 

 

Léah Thomas-Bion